• Les origines

    Je suis née le 1er avril 1940 dans le petit village d'Ihithe, non loin de Nyeri, capitale de la province Centre du Kenya. Cette région des Hautes Terres, butant sur les contreforts des monts Aberdare et dominée, au nord, par le mont Kenya, avait également vu naître mes grands-parents et mes parents. C'étaient des paysans de la tribu des Kikuyu, l'une des quarante-deux ethnies du Kenya et, à l'époque comme aujourd'hui, la plus importante par le nombre. Ils cultivaient un petit lopin de terre et élevaient quelques vaches, chèvres et moutons.
    Deux semaines après le début de mbura ya njahi, la saison des longues pluies, ma mère me mit au monde à la maison, dans une hutte traditionnelle aux murs de terre et de bouse séchée, sans eau courante ni électricité. Elle était entourée de quelques cousines, tantes et amies, et la sage-femme du village était venue l'aider. J'étais le troisième enfant et la première fille de la famille. Et j'appartenais à cette génération charnière qui eut le privilège de connaître les ultimes vestiges d'un monde ancien, dont la culture, les traditions, les croyances et jusqu'aux paysages commençaient inexorablement à disparaître.
    Les campagnes des environs d'Ihithe étaient alors encore vertes, luxuriantes et fertiles. La région était tapissée de forêts, sous-bois et fourrés, foisonnants de fougères et de toutes sortes de plantes ram­pantes. Certains arbres, comme le mitundu, le mikeu et le mûgumo, donnaient des baies et des noix dont se régalaient les enfants. La terre, d'un beau rouge sombre, était riche et humide. Notre peuple cultivait de vastes champs de maïs, de haricots, de céréales et de légumes bien irrigués, et ne connaissait pas la faim. Le rythme des saisons était si régulier que l'on pouvait prédire sans trop de risque de se tromper que les grandes pluies de mousson commenceraient à la mi-mars. Ces pluies enflaient si bien les rivières que jamais on ne manquait d'eau potable. Et quand juillet arrivait, le brouillard à couper au couteau n'étonnait personne : on savait qu'à cette période de l'année, on ne verrait pas à trois mètres devant soi, et que les matins seraient si froids qu'une gelée blanche recouvrirait les pâturages. En langue kikuyu, juillet se dit d'ailleurs mworia nyoni, «le mois où les oiseaux pourrissent», car les oiseaux mouraient de froid et tombaient des branches !
    Chaque naissance était célébrée par un très beau rituel, par lequel la communauté accueillait le nouveau-né sur la terre de ses ancêtres, aussi abondante que généreuse. À peine le bébé avait-il poussé ses premiers vagissements que les femmes qui avaient assisté à l'accouchement allaient couper sur l'arbre un gros régime de bananes encore vertes. Si un seul fruit était un peu trop mûr ou avait été picoré par les oiseaux, le régime était jugé indigne de cette grande occasion : il fallait alors en chercher un autre, généreux et entier, qui symboliserait la plénitude et le bien-être, deux valeurs essentielles aux yeux de la communauté. Puis elles faisaient la tournée des potagers et de leurs champs pour ramener aussi à la jeune mère des patates douces et de la canne à sucre - mais pas n'importe laquelle ! Seule la kigwa kia nyamuiru, une variété indigène à tige mauve, faisait l'affaire.

    La future mère avait pour sa part engraissé depuis plusieurs mois un agneau, qu'elle gardait jalousement à l'intérieur même de sa case. Pendant que les femmes collectaient les fruits et légumes traditionnels, le père de l'enfant sacrifiait l'agneau et en faisait cuire un morceau. On ajoutait alors les bananes et les patates douces sur le gril et, avec la viande et la canne à sucre, on apportait les plats à la jeune maman. Celle-ci mâchait consciencieusement une bouchée de chaque aliment pour bien le réduire, et donnait la becquée à son enfant. Tel fut donc mon premier repas ; avant même d'avoir tété le lait maternel, j'avais goûté les fruits de notre terre : du jus de banane verte, de canne à sucre mauve, de patate douce et d'agneau gras.
    Dès ma venue au monde, j'étais autant l'enfant de ma terre que celui de mon père, Muta Njugi, et de ma mère, Wanjiru Kibicho. Conformément à la tradition kikuyu, mes parents me donnèrent le prénom de ma grand-mère paternelle, Wangari. 
     

     

    Biographie de l'auteur

    Née en 1940 à Nyeri au Kenya, Wangari Muta Maathai est une militante féministe, pacifiste et écologiste. Biologiste, enseignante, elle devient en 2004 la première femme africaine à recevoir le prix Nobel de la paix pour "sa contribution en faveur du développement durable, de la démocratie et de la paix".

    • Broché: 428 pages
    • Editeur : J'ai lu (1 juin 2011)
    • Collection : J'ai lu Récit
    • Langue : Français
    • ISBN-10: 2290014583
    • ISBN-13: 978-2290014585

     


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  • Persuadée bien avant la « mode verte » qu’en préservant la Terre, on protège les hommes, Wangari Maathai a lancé une opération, vaste et symbolique, de reboisement de l’Afrique par les femmes.
    30 millions d’arbres ont déjà été plantés en 30 ans. Mais les droits des femmes, la démocratie, la non-violence sont aussi au coeur de tous les combats qui font sa vie. Elle a reçu le Prix Nobel de la Paix en 2004.

    Ce superbe livre d'une quarantaine de pages, au format d'album pour la jeunesse, peut fournir l''occasion d'une belle révélation, tant pour les adultes que pour les plus jeunes.
    Le texte de Franck Prévot, d''une simplicité lumineuse, nous fait découvrir la femme exemplaire qu''est Wangari Maathai (née Wangari-Miriam Mutha), Kényane d'ethnie kikuyu, née dans le centre du Kenya en 1940: une femme qui a su accomplir en Afrique, par son courage, sa force morale et sa persévérance, une véritable révolution écologique et sociale, lançant en Afrique, dès 1977, le "Mouvement de la Ceinture Verte" (Green Belt Movement), remarquable lutte contre la déforestation, mais aussi, pour la démocratie et les droits des femmes.
    On découvre, dans une langue claire et pure, l''enfance de Wangari, ses combats précoces: et ce, pour une toute jeune fille entamant, dès son plus jeune âge, des études scolaires dans le Kenya du début des années 50...
    L''exceptionnelle réussite intellectuelle de Wangari se met très vite au service des causes dans lesquelles elle croit; et auxquelles, très vite, elle va vouer sa vie.
    Le destin exceptionnel de Wangari Maathai, raconté sur 37 pages magnifiquement illustrées (ah- l'immense talent de coloriste d'Aurélia Fronty!), se voit complété de 8 pages de photos (noir/blanc), de documents et de dates utiles, sur la biographie de Wangari Maathai, ainsi que sur l'histoire politique du Kenya- et, pour finir, le lecteur se voit indiquer l'adresse de plusieurs sites Internet pertinents (Green Belt Movement, UNESCO...).
    Un très, très beau livre- à offrir ou à s'offrir, en cette année 2011 qui est, ne l'oublions pas... l'"Année Internationale des Forêts"!

    • Relié: 45 pages
    • Editeur : Rue du monde (5 mai 2011)
    • Collection : Grands portraits
    • Langue : Français
    • ISBN-10: 235504158X
    • ISBN-13: 978-2355041587

     

     


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  • Planter des arbres dans le désert, transformer des algues ou des déchets en carburant, produire de l'électricité avec les vagues, dépolluer l'eau dans d'élégants jardins, être payé pour faire des économies d'énergie, mettre les banques au service de l'environnement... Loin d'un rêve utopiste, ces solutions existent. De Dakar à Stockholm, de Tokyo à Sao Paulo, des femmes et des hommes se battent pour un monde meilleur, où l'économie marche de pair avec l'environnement. Jeunes ingénieurs, créateurs de l'association " Shake your Planet ", Dimitri Caudrelier et Matthieu Roynette sont partis à leur rencontre pendant un an. Ils nous dressent de nombreux portraits touchants de chercheurs passionnés, maires enthousiastes, industriels visionnaires, mais aussi de simples citoyens qui entreprennent pour changer le monde. Et puisque ces solutions vertes seront bientôt notre quotidien, les auteurs nous font comprendre " comment ça marche ", à travers des explications simples et illustrées, commentées par vingt-sept experts en environnement.

    • Broché: 358 pages
    • Editeur : Jean-Claude Lattès (13 mai 2009)
    • Langue : Français
    • ISBN-10: 2709633310
    • ISBN-13: 978-2709633314

     

     

     


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  • Imaginez un monde... Où une banque permet aux trois quarts de ses clients de se sortir de l'extrême pauvreté tout en étant parfaitement rentable... Où un hôpital soigne gratuitement deux patients sur trois et fait des bénéfices... Où les agriculteurs se passent de produits chimiques tout en augmentant leurs rendements... Où les emballages sont biodégradables et nourrissent la terre au lieu de la polluer... Où un entrepreneur de textile qui refuse les délocalisations parvient à doubler son chiffre d'affaires tout en payant ses employés deux fois le salaire minimum... Ce monde existe. Sylvain Darnil et Mathieu Le Roux l'ont exploré. Pendant quinze mois, ils ont parcouru la Planète à la recherche de ces entrepreneurs exceptionnels. Loin du fatalisme ambiant, ces hommes et ces femmes ont réussi à construire le monde dont ils rêvaient au lieu de subir celui qui existe. Ces 80 histoires prouvent que les initiatives de développement durable ne sont pas des lubies d'écolos babas mais des entreprises qui marchent. 12e prix Rotary du livre d'entreprise, Prix littéraire des Droits de l'Homme 2005.

    • Poche: 316 pages
    • Editeur : Le Livre de Poche (4 octobre 2006)
    • Collection : Littérature & Documents
    • Langue : Français
    • ISBN-10: 2253118257
    • ISBN-13: 978-2253118251

     

     


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